Ils ont survécu à la CSRD : Témoignages et évolutions réglementaires.

Temps de lecture : 8 min

Ecrit par Benjamin Morand

Le 26 septembre 2024 Positive Company® et PKF Arsilon vous conviaient à un webinaire sur la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) et accueillaient les entreprises DMS Imaging et le groupe EBRA pour écouter leur témoignage sur la préparation et la mise en œuvre de la nouvelle réglementation. Cet article vous propose un résumé complet des différents points abordés lors de cette matinée.  

La CSRD marque un tournant dans la manière dont les entreprises européennes doivent aborder la durabilité. Elle s'inscrit dans le cadre du Green Deal et vise à faire de l'Europe le premier continent neutre en carbone d'ici 2050. Ce changement réglementaire cherche également à assurer la pérennité du tissu économique européen en rendant les entreprises plus résilientes et compétitives à long terme.


1.     Que change la CSRD par rapport à la Déclaration de Performance Extra-Financière ?

La CSRD apporte plusieurs innovations majeures et se repose sur cinq principales nouveautés :

·       Une comparabilité accrue des entreprises : Les entreprises doivent fournir des informations standardisées permettant une meilleure comparaison entre elles, facilitant l'évaluation de leur impact sur l’environnement.

·       Un principe de double matérialité : L'analyse des entreprises se fait désormais sous deux angles. D'une part, la "matérialité financière" considère les impacts des enjeux environnementaux et sociaux sur l'entreprise. D'autre part, la "matérialité d'impact" évalue comment l’entreprise affecte son environnement à travers ses activités, tant en amont qu’en aval.

·       Un élargissement du champ d’application : La CSRD concerne désormais davantage d'entreprises, y compris celles cotées et non cotées, avec un périmètre élargi intégrant les comptes consolidés et certaines informations liées à la chaîne de valeur.

·       L’audit obligatoire : Les rapports produits doivent être audités afin d’assurer la fiabilité des informations.

·       Un format imposé : Le rapport de durabilité doit respecter des normes de reporting communes, les European Sustainability Reporting Standards (ESRS), et être transparent. Les entreprises sont tenues de communiquer leurs informations sans obligation d’action immédiate, favorisant la transparence avant tout.

A noter que la CSRD est une obligation de communication et non d’action ! Elle n’engage donc pas l’entreprise à agir, mais bien à être transparente sur les mesures prises ou en cours.

2.     Focus sur la matrice de double matérialité : en quoi consiste l’exercice ?

En plus de la déjà connue matérialité financière, l'une des grandes nouveautés de la CSRD est l’introduction de la matérialité d'impact. Cela pousse les entreprises à analyser non seulement l'impact de leur environnement sur elles, mais aussi comment leurs activités affectent l'environnement et la société.

Formaliser sa matrice de double matérialité est un exercice complexe qui nécessite de suivre un processus précis, que Positive Company® vous résume ci-dessous :

  • Formaliser sa chaîne de valeur pour identifier les parties prenantes et les activités critiques.
  • Identifier ses IRO (Impacts Risques et Opportunité) en s’appuyant sur des benchmarks comme le Global Risk Report ou les normes SASB.
  • Classer les IRO selon les critères de gravité et de probabilité imposés par la CSRD.
  • Consulter les parties prenantes pour affiner cette classification.
  • Consolider les résultats et les intégrer à l’analyse d’écart pour une meilleure transparence.


3.     Comment se préparer à la CSRD ? Les 7 étapes clés.

 

Pour aider les entreprises à se conformer à la CSRD, Positive Company® et PKF Arsilon vous recommandent de suivre 7 grandes étapes :

  1. Déterminer son éligibilité et cadrer le projet : cela consiste à identifier si votre entreprise est concernée par la directive et à définir un plan d’action.
  2. Former et sensibiliser les équipes : c’est-à-dire assurer la montée en compétences des collaborateurs et impliquer tout le management (CODIR, COMEX).
  3. Formaliser la chaîne de valeur et la matrice de double matérialité : à savoir identifier les parties prenantes et cartographier les impacts directs et indirects de l’entreprise.
  4. Analyser les écarts et prioriser : c’est donc comparer les exigences de la CSRD avec la situation actuelle de l’entreprise pour identifier les écarts.
  5. Déployer une feuille de route : mettre en œuvre les mesures correctives pour combler les écarts identifiés.
  6. Rédiger le rapport : donc produire les indicateurs nécessaires et rédiger le rapport en conformité avec les normes ESRS.
  7. Faire auditer : faire auditer le rapport avant publication.


Témoignages de DMS Imaging

DMS Imaging est une PME spécialisée dans le diagnostic médical, avec 120 collaborateurs et un chiffre d'affaires de 50 millions d'euros. Bien qu'elle ne soit pas soumise à la DPEF, l'entreprise devra se conformer à la CSRD d'ici 2026 et a choisi de commencer dès maintenant à se préparer.

Valérie Pugnaloni, Group Chief Financial Officer & Executive Board Member chez DMS, nous explique que le pilotage du projet est assuré par le DAF et le RAF, dans un contexte où la sensibilisation à la CSRD est hétérogène parmi les équipes. Certains collaborateurs, comme ceux des RH et de la supply chain, sont déjà conscients des enjeux, tandis que d'autres nécessitent une sensibilisation plus approfondie, élément clé selon elle.

Afin de parvenir à une matrice de double matérialité et de se conformer à la CSRD, l’entreprise s’est donnée 18 mois pour se préparer à cette nouvelle obligation. Pour Valérie, il est important de voir la CSRD comme une opportunité de structurer et améliorer leurs processus sur le long terme. Etant donné leur taille, DMS n’avait pas forcément les ressources internes disponibles pour effectuer le travail de décorticage de la CSRD et des guides de l’EFRAG, et un accompagnement externe lui semblait indispensable pour gagner en efficacité. Les deux jours de formation réalisés en amont par PKF Arsilon ont notamment permis de rationaliser les efforts et de se lancer rapidement dans le projet.

La démarche s'est révélée très pragmatique, optimisant à la fois le temps des équipes et facilitant également la gestion du projet. Un des facteurs clés de succès selon Valérie fut la méthode transverse qui impliquait plusieurs services de l’entreprise. L’outil utilisé par PKF Arsilon s’est également révélé simple à prendre en main. Valérie se sent aujourd’hui prête à renouveler l’exercice les années suivantes, notamment grâce à la clarté apportée par l'accompagnement sur des notions clés comme les IRO et les risques bruts.


Témoignage du groupe EBRA

Ebra, un groupe de presse produisant 800 000 exemplaires par jour, est avancé dans sa démarche CSRD en partie grâce à la pression exercée par leur actionnaire, très en avance sur les sujets ESG. Le pilotage du projet est assuré par la RSE et la direction industrielle car la consommation papier et le transport ont un impact carbone significatif dans leur activité.

Le projet a nécessité une forte mobilisation du COMEX et du CODIR, et a impliqué 400 collaborateurs. La démarche a nécessité beaucoup de pédagogie et d'adaptation pour rendre les concepts comme l'impact carbone accessibles à tous. Le groupe a aussi intégré un benchmark externe pour se comparer à ses pairs.

Le calendrier est étendu sur 12 mois, avec 6 mois dédiés à la collecte et à la normalisation des données, en vue de la publication du rapport de durabilité. Les données doivent être prêtes pour janvier 2025 afin de finaliser le rapport en mars. L'entreprise a également prévu un pré-audit pour s'assurer de sa conformité.

Le groupe EBRA a choisi de se faire accompagner par Positive Company® afin de donner de la crédibilité à leur projet. Cette démarche a permis de simplifier les livrables, notamment les documents liés à l'EFRAG, et de structurer la communication avec leur actionnaire.


4.    Pour terminer : 10 conseils pour bien déployer la CSRD au sein de votre entreprise


  • Sensibiliser pour embarquer la direction
  • Se former pour internaliser la compétence
  • Être transversal : réunir les fonctions transversales etc.
  • Utiliser des benchmarks et des analyses sectorielles
  • Aller à la rencontre des expertises internes et externes
  • Formaliser sa CDV
  • Définir ses échelles de cotations des IRO : les quantifier si possible et les préciser (quand, où)
  • Exclure les data points non pertinents et utiliser les dispositions transitoires (1200 data points au total. Ne garder que le pertinent)
  • Prioriser les informations à produire pour son premier rapport
  • Valoriser son existant en s’appropriant le contenu des normes : les normes pas toujours pédago ou intelligible, donc prévoir temps d’appropriation des attendus


Pour conclure, la CSRD, bien qu’exigeante, représente une opportunité pour les entreprises de structurer leur démarche de durabilité, de renforcer leur compétitivité et de répondre aux attentes croissantes des parties prenantes. Avec une approche méthodique, des outils adaptés et un accompagnement ciblé, il est possible de relever ce défi tout en capitalisant sur les engagements RSE.


Pour en savoir plus, regardez le replay de notre atelier :

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